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Jézabel Couppey-Soubeyran : « C’est de la facture de gaz et d’électricité que vient la baisse de l’inflation, pas de la politique monétaire »

Sur le tableau de bord de la Banque centrale européenne (BCE), le chiffre de l’inflation annuelle du mois d’octobre, + 2,9 %, n’est plus si loin de la cible de 2 %. Faut-il y voir le succès des hausses des taux effectuées par la BCE au fil de ces derniers mois ou, au contraire, la preuve que le phénomène était transitoire et ne justifiait pas de remonter si vite et si fort le prix de l’argent ? Peut-être ni l’un ni l’autre car, à bien y regarder, cette moyenne masque une mosaïque de situations fort contrastées entre les pays membres.
En Belgique et aux Pays-Bas, le niveau général des prix des biens et services consommés par les ménages a reculé entre le mois d’octobre de cette année et celui de l’an passé : l’inflation y est donc… négative. Ce recul est le plus fort en Belgique, où le taux a baissé de 1,7 %, tirant vers le bas la moyenne de la zone euro. Dans quatre autres pays, le taux d’inflation se situe en dessous de la moyenne : Italie (1,8 %), Luxembourg (2,1 %), Lettonie (2,3 %), Finlande (2,4 %). Mais dans les quatorze autres pays, le taux d’inflation la dépasse, parfois de beaucoup. Le taux annuel a certes baissé en France, mais il atteint encore 4,5 %. Il baisse en Allemagne (3 %) et au Portugal (3,2 %), mais reste au-dessus de la moyenne. Il continue d’augmenter en Grèce (3,8 %) et en Espagne (3,5 %). Le taux le plus haut est celui de la Slovaquie (7,8 %), suivie d’assez près par la Croatie (6,7 %) et la Slovénie (6,6 %). Des résultats trop contrastés pour que l’on puisse parler d’une désinflation généralisée.
Là où le taux d’inflation est devenu négatif, en Belgique (– 1,7 %) et aux Pays-Bas (– 1 %), il est trop tôt pour parler de déflation. D’une part, la baisse des prix devrait aller de pair avec un recul de l’activité. Or, si c’est le cas aux Pays-Bas, où le recul du produit intérieur brut s’accentue légèrement au troisième trimestre (– 0,5 % après – 0,2 %), en Belgique au contraire la croissance a légèrement accéléré au cours de la même période (+ 1,5 % au troisième trimestre, contre + 0,1 % dans la zone euro).
D’autre part et surtout, alors qu’une déflation implique un recul généralisé des prix, la baisse de l’inflation dans les deux pays tient pour ainsi dire à un seul poste de dépenses, « logement, électricité et gaz », dont les prix ont baissé de près de 30 % en Belgique comme aux Pays-Bas entre octobre 2022 et octobre 2023, et qui pèse lourd dans le calcul de l’indice des prix (20,1 % en Belgique, 16,4 % aux Pays-Bas). En revanche, les prix des autres postes de dépenses, en particulier l’alimentation, continuent d’augmenter. Belges et Néerlandais ne ressentent assurément pas la déflation quand ils vont acheter de quoi manger et paient leurs loyers, d’autant que la part des loyers est bien plus basse dans l’indice des prix, compte tenu du fait que cette dépense est nulle pour les propriétaires, que dans le budget des locataires.
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